« L’eau est abondante sur Terre. En 2015, chaque habitant disposait en théorie, de 5700 m3 d’eau douce et devrait en disposer de 4800 m3 en 2025 », explique Luc Descroix de l’Institut de recherche pour le développement (Ird). Cependant, l’hydrogéologue constate que: « la ressource est très inégalement répartie. Dix 10 pays se partagent 60% de la ressource avec en tête: le Brésil, la Russie, la Chine et le Canada. Les trois premiers ont aussi des problèmes d’aridité dans une partie de leur territoire. La Chine avec 1,5 milliard d’habitants soit 22% de la population mondiale, reçoit 7% des précipitations sur la Planète. L’Amazonie reçoit 15% de la pluie pour 0,3% de la population ». Ces faits témoignent de la répartition naturellement inéquitable de la ressource.
Luc Descroix, a livré une présentation sous le thème « Eau ressource : eau source de coopération et de conflits ? » lors de la 5ème édition des trimestriels de l’Observatoire des valeurs sociétales et éthiques des organisations (Ovseo) sous le thème : « Gestion intégrée des ressources en eaux (Gire) : Accès durable à l’eau, conflits et perspectives », le mardi 31 octobre 2017 à Dakar. De l’avis de M. Descroix, les eaux douces exploitées ont une origine continentale : les eaux de précipitation : atmosphère ; les eaux de surface : rivières, plans d’eau ; les eaux souterraines : elles proviennent du sous-sol (aquifères ou roches réservoirs) captées par sources naturelles ou forages. Elles représentent 0,6 % de la ressource totale en eau.
« La population mondiale a atteint les 7,5 milliards d’habitants en 2017 ; elle a donc triplé en 100 ans ; mais les prélèvements globaux en eau ont été multipliés, eux, par 6 ; en effet la consommation d’eau par habitant a augmenté bien plus vite que la population, surtout dans les pays dits développés. En plus de l’augmentation de la consommation domestique avec l’élévation du niveau de vie, la production agricole a considérablement augmenté depuis le début des années 1950 surtout et en grande partie du fait d’un recours accru à l’irrigation. Plus de 800 millions de personnes souffrent de la faim dans le monde malgré cette forte augmentation de la production, qui s’est de fait ralentie depuis les années 1980 », détaille-t-il avant de conclure en ces termes. « On est passé de 5 000 barrages en 1950 à plus de 45 000 de nos jours ; l’ensemble de leurs réservoirs modifie de 16% le débit naturel des fleuves et les conséquences écologiques et sociales sont parfois énormes. La pénurie est tangible ; on utilise plusieurs seuils pour l’estimer à savoir le seuil de contrainte ou d’alerte à moins de 1700 m3/hab/an, situation de 46 pays et 1,5 milliards d’habitants en 2008 ; le seuil de pénurie relative, inférieur à 1000 m3/hab/an concerne 28 pays et 300 millions d’habitants en 2008 et le seuil de pénurie critique ou absolue à moins de 500 m3/h/an, intéresse l’Algérie, la Tunisie, la Palestine, Israël, la Jordanie, la Libye, l’Arabie Saoudite entre autres. Au Sénégal en 2017, on évalue à 2 000 m3/hab/an ».